Le stress carburant du travail ?
Introduction
Le monde du travail est en constante évolution et ses relations aux individus également. Depuis plusieurs années, on observe une course frénétique des entreprises à vouloir toujours « plus », une meilleure qualité et plus rapidement.
Pour arriver à leurs fins, elles poussent leurs salariés à leur maximum souvent de manière peu orthodoxe (manipulation mentale comme l’utilisation du management managinaire – où la fusion entreprise/salarié est la clef de voute).
Cette conquête d’excellence qui devient la valeur clef de la réussite professionnelle engendre des effets pervers quand elle est poussée à son paroxysme.
Qui n’a jamais prononcé ces phrases « Je suis stressée ! » ou « Tu as l’air stressé » ?
Le stress… voilà ce mal qui touche une majorité des individus tant sur leur sphère privée que professionnelle. Il tient donc une place prépondérante dans notre vie de tous les jours.
Un sondage réalisé en 2012, nous informe que sur une période de 12 mois, 87.2% des Ressources Humaines déclarent avoir été confrontés à des problèmes de stress subi par des salariés et que 50.4% de ces mêmes RH disent s’être souvent ou très souvent retrouvés eux-mêmes en situation de stress professionnel au cours de cette même période. (Etude réalisée par les Editions Tissot et Sysman France).
Le stress comme « carburant » de l’entreprise doit être envisagé sous deux angles antagonistes. En premier lieu, le stress négatif et non maîtrisé puis en second lieu le stress positif qui reste un outil utile. Une synthèse permettra de faire le point sur ces deux approches.
Qu'est ce que le stress ?
Avant de rentrer dans le vif du sujet, il convient de définir ce qu’est le stress.
Le stress est un processus qui entraîne la perception d’un déséquilibre important entre une demande environnementale et des capacités à y faire face. Par conséquent, nous ne sommes pas tous égaux face au stress ! Le stress va dépendre uniquement de notre perception face à l’élément stressant.
Chaque individu va donc tenter de s’adapter au mieux à la situation dite stressante en fonction de son patrimoine génétique, de sa personnalité, de sa situation sociale et économique ainsi qu’à des évènements qu’il a vécu tout au long de sa vie.
Hans Selye, qui est reconnu pour être l’inventeur de cette notion de stress, a été un pionner dans ce domaine. Il le définit « comme l’ensemble des moyens physiologiques et psychologiques mis en œuvre par une personne pour s’adapter à un évènement ».
Selon lui, deux types de stress existent :
- Le stress dit négatif qui ne permet pas un retour à l’équilibre de l’organisme suite aux stimuli. Ce stress engendre un état de détresse qui peut se traduire par différents disfonctionnements.
- Le stress dit positif qui permet à notre cerveau de se mettre en alerte et qui contribue à l’amélioration de notre concentration et de notre mémorisation.
Le bon stress… ou stress dit "bénéfique".
Le bon stress est une réaction instinctive face à une agression. C’est une réaction positive qui va stimuler et augmenter la performance de l’individu en déclenchant la fonction d'adaptation. C'est donc un outil à fort potentiel qui permettra à une personne de se challenger, de se motiver et de pousser ses limites.
Pour ce faire, l’individu doit bien se connaître, il pourra ainsi gérer son stress. Chaque personne est différente et c’est avec cette donnée qu’il faut composer.
Les facteurs qui vont influencer le degré de stress peuvent être définit comme suit :
- Prise en compte du niveau d’entraînement d’une personne et de la confiance en ses capacités
- Prise en compte du niveau de difficultés de la tâche à accomplir (objectifs fixés)
- Prise en compte de la personnalité de chaque individu.
L’ensemble de ces données, me fait penser à une certaine catégorie de personne qui sont le parfait exemple du stress positif (dans la plupart des cas) : les forces de l’ordre en général et plus particulièrement les forces spéciales et les unités d’élites.
Lorsque l’on se documente sur le sujet, on se rend compte qu’ils occupent des postes qui sont par définition même « stressants », des prises d’otage comme au bataclan face à des terroristes lourdement armé ou face à un homme suicidaire et simplement retranché chez lui avec une arme, des interventions dans les 4 coins du monde sur des missions face à des dangers que nous ne pourrions même pas imaginer…
Ces personnes risquent leur vie à chaque fois et pourtant ils recommencent…
Mais comment font-ils ?
Je pense que c’est le meilleur exemple du stress positif car ces hommes et femmes sont préparés psychologiquement et physiquement, ils se connaissent, ils savent de quoi ils sont capables, ils ont été testés et entraînés et le font continuellement. Ils savent gérer leur stress et ils s’y adaptent afin que celui-ci ne soit pas un handicap bien au contraire.
Lors de mes lectures, j’ai pu constater que ce qui fait la force de ces unités c’est l’esprit de corps, l’appartenance à un groupe avec un soutien indéfectible. Ils ne font qu’un et sont toujours là les uns pour les autres. La motivation et la performance même avec un stress extrême (par rapport aux situations qu’ils peuvent vivre) est toujours présente et bénéfique grâce à ce lien.
Et dans le cadre de l' entreprise ?
Dans la plupart des entreprises, on peut constater qu’il n’y a pas du tout le même état d’esprit que dans mon exemple ci-dessus. Même si les milieux sont différents, on peut quand même faire le parallèle et se poser des questions, non ?
Lorsque l’entreprise et surtout les managers sont bien préparés à la gestion du stress, ils permettent aux collaborateurs de s’appuyer sur différents outils.
Le stress souvent vulgarisé comme un effet néfaste, ne l’est pas tant que ça finalement. On pourra retenir que c’est une magnifique réaction de l’organisme, un instinct de survie qui permet à l’être humain de s’adapter à son environnement.
Le mauvais stress ou stress dit "néfaste".
Quelques chiffres :
- Le nombre de suicides sur le lieu du travail a progressé de 20% en deux ans.
- 4/10 français sont touchés par le stress – la France tient le 3ème rang mondial des dépressions liées au travail.
- 22% des salariés souffrent d’un état de stress qui les mettent potentiellement en zone rouge.
- Le nombre de maladies liées au stress a augmenté de 50% en 5 ans.
- Selon l’Institut de veille sanitaire, le stress est la cause de plus de 200 000 maladies par an.
- Pour 90% des professionnels, la pression s’est accrue dans les entreprises ces dernières années ; selon un sondage réalisé auprès de 9000 membres LinkedIn.
Lorsqu’on regarde les chiffres énoncés ci-dessus, on remarque que le stress, même s’il n’est pas encore reconnu comme étant une maladie professionnelle, cause de nombreux dégâts sur la vie de milliers de français.
Pour moi, une entreprise qui utilise le stress comme « carburant » de performance et de motivation est une entreprise qui ne peut durer sur le long terme. Je ne valide pas du tout ce genre de pratique qui ne tient pas compte du facteur humain et de l’individualité de chaque personne.
De part mon expérience professionnelle, je suis amenée à échanger régulièrement avec des personnes appartenant à des milieux différents et à chaque fois la conversation s’oriente sur le bien-être au travail. Peu de ces échanges sont positifs sur l’épanouissement du salarié au sein de son entreprise.
Je n’en suis absolument pas surprise.
L’évolution de l’environnement économique, social, sociétale ou tout simplement du monde du travail fait peser sur l’entreprise une charge très importante.
Celle-ci répercute, cette pression sur ses subordonnés. Elle leur fait comprendre qu’elle veut des « gagnants ». L’entreprise pousse sans cesse au dépassement de soi pour se démarquer des autres et être bien vu de sa hiérarchie.
Le stress apparaît quand il y a un déséquilibre entre la demande qui devient supérieure aux ressources mises en face de celle-ci ; le stress devient alors néfaste pour l’individu.
Le stress, qui est devenu la source de nombreux maux, est une notion complexe car il dépend de beaucoup de paramètres.
Ce que beaucoup d’entreprises oublient c’est que les salariés représentent le capital humain dans lequel elles doivent investir autant, sinon voir plus, que dans les autres capitaux. Chaque personne est remplaçable mais à quel prix…
Quels sont les facteurs d’apparition du stress sur le lieu de travail ?
Pour moi, une des premières causes du stress sur le lieu de travail est cette course à la compétitivité et à la performance couplée à une mauvaise préparation de la hiérarchie. Une mauvaise préparation à gérer le stress aux plus hautes sphères d’une entreprise se répercute forcément sur tout ce qui se trouve en dessous.
La gestion d’une équipe stressée est compliquée, le manager doit s’organiser pour atteindre ses objectifs et en même temps manager des demandes d’aide et de soutient de la part de ses subordonnées. Mais si, en plus, le manager est stressé … on ne peut qu’aller dans le mur.
La pression continuelle qui est exercée sur les salariés est pour certains difficile à vivre, tous ne s’adaptent pas aux mêmes rythmes car chaque personne à son individualité.
Le management doit prendre en compte cette composante. Le manager doit gérer un groupe mais ce groupe est composé d’individualité propre donc en amont lors du recrutement puis lors de la création de ces groupes de travail, il faut mettre l’accent sur une composition plus homogène.
Comment ? Il existe des tests afin d’affiner au mieux les compétences professionnelles mais aussi les « compétences » émotionnelles de chacun.
Une autre raison d’apparition du stress poussé à son maximum est la déshumanisation des relations. Tout devient de plus en plus numérique car les méthodes de travail évoluent mais le propre de l’homme est l’interaction sociale… or le virtuel n’est pas aussi interactif que le réel. Par pure gain de temps, on préfère se fixer un rendez-vous par visioconférence.
L’entreprise ne demande plus aux salariés ce qu’ils en pensent ou ce qu’ils souhaitent, elle leur donne des objectifs qui ne laissent pas d’autres choix à ces individus d’appliquer toutes les méthodes nécessaires à booster la productivité, la compétitivité et le gain de temps.
Et l’adaptation dans tout ça ?
L’homme a la capacité de s’adapter à tous changements (théorie de l’évolution de Charles Darwin) mais il lui faut du temps, or à l’heure actuelle, cette capacité d’adaptation est pressée à son maximum et est fortement mise à mal. L’évolution peut parfois prendre du temps mais dans le milieu professionnel, on vous dira qu’on n’a pas le temps !
La vraie intelligence de l’être humain, c’est sa capacité d’adaptation. Les hommes se font à tout, y compris au pire….
Une autre aberration est le droit à la déconnexion. Il n’y a plus de séparation entre la vie professionnelle et la vie privée… il est quand même important de soulever qu’une loi a dû être voté, avec des sanctions à la clef, pour faire prendre conscience aux entreprises et aux salariés qu’il fallait pouvoir se déconnecter du travail !
C’est comme les notices de poussettes aux Etats-Unis qui précisent qu’il faut enlever l’enfant ou le bébé avant de plier la poussette….
Où est l’équilibre entre notre vie de famille et notre vie au travail… ?
Beaucoup d’études portent maintenant sur les risques psychosociaux, elles montrent que les effets sont néfastes car ils affectent les salariés tant sur leur santé physique que sur leur santé mentale et donc forcément les entreprises (maladie professionnelle, arrêts répétitifs, accident du travail, turn-over…)
Les conséquences du stress au travail sur la santé du salarié sont de trois types :
- Émotionnels : Burn-out, dépression, mal être, angoisse, irritabilité, manque de concentration, perte de créativité/de motivation/de productivité/vigilance…
- Comportementaux : harcèlement moral ou sexuel, addiction à l’alcool/drogue/ médicament/jeux…
- Physiques : troubles du sommeil, hypertension, problème cardiaque, maux de tête, troubles gastriques, prise de poids, fatigue…
Les médias commencent à parler de ce mal-être au travail, les suicides sur les lieux de travail (Orange, EDF, mais également dans les rangs des Forces de l’Ordre) mais au final qu’est ce qui est mis en place pour résoudre ce problème de société ?
Personnellement, je pense que la majorité des actions mises en place ne sont que de la « poudre aux yeux » pour dire que des actions sont menées pour le bien-être.
Si l’on veut réellement tenir compte de la santé d’une personne ce n’est pas en lui mettant une salle de sport à disposition dans l’enceinte de l’entreprise ou en lui accordant 30 minutes de soins corporels tous les 15 jours que la personne ira mieux.
D’une part, il n’y aura pas cette déconnexion du travail (même que partielle) et d’autre part les actions doivent durer sur le long terme.
Mais pour moi, l’argument le plus important et d’ailleurs le seul qui soit tangible est qu’il faut que l’individu décide lui-même qu’il a besoin d’un break, d’une pause et d’avoir une vie en dehors de son travail.
Tant qu’il n’aura pas pris conscience de ce dont il a réellement besoin, l’entreprise pourra mettre en place toutes sortes d’actions, ça ne marchera pas !
Solutions ?
Une action qui pourrait être significative serait par exemple chaque vendredi soir lorsqu’on quitte son poste, on laisse son ordinateur, son téléphone ainsi que tous les documents au bureau.
Si l’entreprise veut réellement aider ses employés, elle doit les reresponsabiliser ou rééduquer en leur faisant prendre conscience qu’ils doivent travailler pendant les horaires de bureau (voir heures supplémentaires s’ils le souhaitent) mais qu’en dehors de ces heures, ils doivent vivre leur vie et s’épanouir.
Je sais ma théorie est totalement utopique…
Souvent les problèmes sont pris à l’envers, lorsque je consulte mon médecin pour un problème de santé, il va me poser des questions, m’examiner et essayer de chercher d’où vient mon mal (mal a dit). Il va investiguer afin d’éliminer la raison qui déclenche la maladie.
Il ne va pas, sans aucune recherche, juste traiter mes symptômes car ceux-ci vont disparaître et réapparaitre.
Pour le stress au travail, il faudrait procéder de la même manière. Prendre le mal à la racine ! Pour cela, le coach est également disponible, vous aidez à y voir clair et à trouver des solutions.
Il n’y a rien de plus important qu’un salarié épanoui car il aura une motivation sans faille et fera face au stress avec aisance.
En conclusion...
Aujourd’hui la recherche du bien-être professionnel est un sujet récurrent. La médiatisation des burn-out ou des suicides liés au travail peut nous laisser penser que cet environnement ne contribue plus autant qu’avant à notre épanouissement personnel et ça malgré l’investissement de beaucoup d’entreprises dans des actions « anti-stress ».
Il y a tout un paradigme autour de cette « maladie » sociétale qu’est le stress mais je pense qu’il faut, comme je l’ai expliqué à plusieurs reprises dans cette dissertation, revenir au principe de base : l’individu.
Mon avis personnel sera que le stress est propre à chaque personne et que chaque personne est différente. Il y a donc des milliers de type de stress différents. Ce dernier sera dans tous les cas liés à la non-gestion des émotions au quotidien, ce qui demande un travail sur soi et une connaissance de soi.
Lorsque la prise de conscience aura été faite, la personne pourra aboutir à un épanouissement personnel et professionnel.
Les entreprises qui font du « stress » leur carburant de performance ne dureront pas dans le temps car l’homme est un être humain et n’est pas une machine. Le stress est un outil de notre instinct de survie et est nécessaire à notre adaptation mais il ne doit pas être utilisé à mauvais escient et être constamment sollicité car peut être un jour il ne fonctionnera plus ou nous ne saurons plus l’écouter…
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